La ducasse, cet autre monument (éphémère) des places de villes et villages
Publié le 11 octobre 2021
Il est des manèges qui ont amusé tour à tour plusieurs générations de mêmes familles. S’ils pouvaient parler, ils raconteraient la place Coget sous toutes ses formes durant ces dernières décennies et, sans doute, bien d’autres histoires !
C’est par exemple le cas du « Baby Chopper » de Gaëtane Sarazin : « Il a 40 ans, avant moi il appartenait à mes parents », indique la foraine. Lors de la première installation de cette attraction à Phalempin, le Minitel et le TGV venaient tout juste d’entrer en service et le disque compact allait bientôt s’imposer dans les foyers les plus branchés… Le manège pour enfants brille pourtant comme s’il était neuf : « Il est entretenu à chaque pause ! s’amuse Gaëtane face à l’étonnement. On le repeint, l’embellit, change les véhicules – trois sont encore d’origine. »
« Les gens reviennent presque comme avant »
Il faut environ 5 heures pour le monter ou le démonter. Cet après-midi de septembre, il ne va pas tarder à être remis en route pour accueillir les enfants à la sortie des écoles. « Les gens reviennent presque comme avant, quand la ducasse était sacrée, se réjouit Gaëtane. Ils sont contents, on revoit des familles complètes, qu’on avait perdues de vue. Il y a pépé, mémé, papa, maman… C’est bien parce qu’on les connaît ! Est-ce que ça va durer ? ça serait merveilleux. »
La foraine pense que le phénomène est pour le moment dû à la fin des privations dues à la crise sanitaire. « C’est comme ce que nos parents nous racontaient de la période d’après-guerre. Cette fois ce n’était pas la guerre mais être enfermé comme ça… » Le 26 septembre, elle a été ravie de retrouver une fête populaire à l’ancienne avec le baptême du géant Saswalon, lors duquel la place était bondée.
Bien sûr, ce n’est plus l’âge d’or de la ducasse. Gaëtane Sarazin se rappelle des années où les manèges s’installaient par dizaines sur toute la place et une partie de la rue Pasteur. Mais elle se souvient aussi d’autres années où elle était quasiment seule. « Aujourd’hui, les enfants ont déjà plein d’activités », note Bruno, son voisin. Sans compter leur fierté. « J’en vois qui n’ont pas plus de 4 ans faire reculer leurs parents lorsqu’ils approchent de mon manège, ils ne veulent pas être vus dedans », rigole Gaëtane avec affection.
Comme tous les forains, ils ont vu des couples se former, revenir avec leurs enfants, se séparer. Leur vie aussi a changé. « On ne déplace plus trop nos caravanes. C’était souvent la pagaille pour peu que quelques véhicules soient mal stationnés lors de notre arrivée. On reste sur notre terrain à Ennevelin, c’est plus facile. »
« Notre gagne pain »
Les confinements, couvre-feux et fermetures liés à la crise sanitaire ont été une rude épreuve. « Même quand on avait le droit d’ouvrir, des communes disaient ‘On annule la braderie donc on annule aussi la ducasse’, regrette Bruno. On a dû expliquer que pour nous, c’est pas de l’argent de poche, c’est notre gagne-pain ! » Il a fallu payer les assurances comme si les véhicules roulaient alors qu’ils restaient stationnés. « On sait se débrouiller, poursuit Gaëtane. Certains ont fait un autre métier en attendant. à l’intersaison, nos parents travaillaient déjà à l’usine. »
Alors que la saison de la betterave démarre dans les champs, Jérôme, un autre voisin ajoute que, par exemple, « quand vous voyez un camion qui transporte des betteraves, vous pouvez être sûr que c’est un forain qui conduit. Les routiers aiment la route, les longs trajets. Nous on a l’habitude de manœuvrer dans des petits espaces, la nuit, dans le brouillard, ça ne nous dérange pas ». Comme chaque année, la ducasse reviendra en 2022 le 4e week-end de juillet le 4e week-end de septembre. « On reste le 5e quand il y en a un », précise Gaëtane.